À bien des égards, ma mission au Cameroun reste l’une des expériences les plus marquantes de ma vie. Première fois que je me rendais en Afrique, j’arrivai à Yaoundé sans vraiment comprendre les réels enjeux de cette mission. Fatigué par les JMJ qui s’étaient finies 3 jours plus tôt et assommé par l’effervescence de la capitale camerounaise, mes premières impressions furent mitigées, et même assez sceptiques. Je pensais réellement ne pas pouvoir m’adapter durant un mois à un mode de vie si radicalement différent du mien.
Cependant, je peux affirmer sans hésiter que l’arrivée à Lomié, petite localité à 300 km à l’Est de Yaoundé, au milieu de la forêt équatoriale, fut une vraie révélation.
C’est sur place que j’ai finalement réalisé les objectifs de la mission : l’importance de l’accès aux livres par les enfants bantous et pygmées-bakas ainsi que la constitution et la mise en marche de la bibliothèque.
Ces enfants, ils étaient une trentaine à être en permanence dans la cour du presbytère, nous
sollicitant dès 6h du matin pour que nous jouions avec eux au football, les fassions lire, leur
ouvrions la bibliothèque ou pour qu’eux-mêmes nous fassent découvrir leur culture.
Quelle fierté ils avaient en voyant notre joie après qu’ils nous aient montrés la rivière Vouri, dans laquelle nous nous baignions presque tous les jours pour échapper à la chaleur tropicale ! Il fallait les voir nous mener par de petits sentiers dans la forêt, pour tantôt nous montrer les meilleurs coins de pêche, tantôt les installations de piégeage ou les endroits où se récoltaient les meilleurs fruits sauvages. Ils étaient heureux de nous voir toujours si volontaire à les suivre, à les considérer, à les écouter. Cela participa, selon moi, à créer de vrais liens de confiance et d’affection qui furent capitaux dans les succès de cette mission.
En plus du projet de bibliothèque, j’avais constitué une petite équipe d’une dizaine d’enfants qui, chaque matin, venait volontairement réviser leurs leçons et s’exercer à la lecture… Leur joie, leur étonnement et leur fierté de faire de si rapides progrès, de lire des phrases entières sans faute furent pour moi une vraie source de bonheur.
La foi fut sans aucun doute l’un des piliers de cette mission : tous les jours, nous assistions à la
messe, la semaine dans la chapelle et le dimanche dans la grande église. Il fallait les voir, si
fervent d’une foi réelle et ardente ! Cela m’a fait réfléchir sur ma propre foi et la façon dont je la
vivais… Loin de toutes les formes d’intellectualisation, de complexification, d’une rationalisation
de ma foi occidentale, que je cherchais paradoxalement à renforcer par de bancales béquilles, j’ai réellement vu et vécu une foi d’une pureté déconcertante, une foi simple, dénuée de tout artifice, une vraie foi à déplacer les montagnes !
Paradoxalement, j’ai l’impression d’avoir moins donné que j’ai reçu et appris… Car se mettre,
dans certaines circonstances, dans le rôle de l’apprenant de celui qui ignore mais qui veut
apprendre vous donne cette curiosité infantile si propice aux découvertes.
Un exemple : j’avais décidé d’apprendre la langue locale, le Zimé. Cette simple curiosité
intellectuelle que je manifestais simplement mis en joie de nombreuses personnes, si étonné que je puisse être intéressé par cette langue. À la fin, je pouvais former quelques phrases et
comprendre quelques impression. Cela créait des sentiments mitigés chez les enfants qui, d’un
côté étaient amusés et contents que j’apprenne leur langue mais inquiet que je comprenne leurs conversations secrètes !
Une autre anecdote me semble révélatrice de l’ambiance qui a dominé durant tout notre séjour.
Quelques enfants nous avaient confié n’avoir jamais gouté de pizzas… C’est pourquoi, avec
quelques enfants, nous avons décidé de construire un four à pizzas en brique de terre et en faire quelques unes avec les ingrédients que nous avions sous la main. Avec de la farine et de l’huile nous avons réussi à faire la pâte, que nous avons garnie de sauce tomate, d’oignons et de chenilles ! La distribution des parts de pizzas faillit tourner à l’émeute ! Mais le résultat fut très positif !
De leur côté, chaque jours les enfants venaient avec une spécialité de la région, tant avec une
goyave, des beignets, des petits rats de brousse…
Ces échanges culinaires furent aussi très importants pour la cohésion du groupe et participa, je le pense, à la réussite du projet !
En somme, cette mission fut, selon moi, à tous égards une véritable réussite. Non seulement les enfants ont pris conscience de l’importance de la bibliothèque et y ont pris goût, mais aussi, je suis reparti grandi dans ma foi et changé dans ma vision d’un continent africain que j’imaginais avec beaucoup d’aprioris.
J’ai une certitude, j’y retourne l’été prochain !
Louis, parti avec Mission Cameroun 2023